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"Face aux crises, une solution : la conversion écologique et sociale de notre société"

Billets / Tribunes

| Par Bruno REBELLE | Dimanche 15 Avril 2012 à 15:37 | 0 commentaire

J'ai eu l'occasion de présenter le concept de "Transition écologique et sociale" devant près de 200 personnes réunis au Forum Relanges Bio. Un moment très intéressant d'échange avec des agriculteurs et des porteurs d'initiatives locales allant de l'autoconstruction à la gestion de monnaies locales en passant par le promotion de jardins partagés, pour confronter les concepts aux perceptions et aux attentes de ces acteurs de terrain.


Tout le monde, ou presque, s’accorde sur l’analyse du monde actuel : enchevêtrement de crises économiques, sociales et écologiques, perte de sens, tensions croissantes qui laissent craindre des explosions de violences…
Tout le monde, ou presque, se satisfait également de la définition d’un nouveau mode de développement qui mettrait en avant des objectifs d’équité sociale et territoriale, de protection de l’environnement du local au global, d’épanouissement des individus et de renforcement de leur appartenance à la société. Certains parlent de développement durable, d’autres évoquent un nouveau modèle de société dans lequel l’économie serait enfin au service de l’homme après que, pendant trop longtemps, l’homme ait été au service de l’économie.
Cependant entre le constat du chaos actuel et le dessein d’un idéal à venir, tout le monde bute sur la méthode pour passer de ce dont on ne veut plus à ce que l’on souhaite tous. Certes des initiatives voient le jour ici ou là, soit sur des secteurs d’activité spécifiques, soit sur des territoires précis. Si ces expériences sont toujours porteuses d’enseignements et d’espoirs, force est de constater qu’elles ne font pas encore « système »… La transformation ne s’opère pas et très vite l’impératif économique reprend le dessus avec son implacable logique : il faut produire des richesses pour alimenter l’économie, et éventuellement pour certains courant politiques pour pouvoir redistribuer ces richesses.
La question n’est donc pas tellement de définir « une fois de plus », le modèle idéal de société qu’il faudrait construire, cet « autre monde possible », mais bien d’identifier les premières étapes de la transformation. En d’autres termes, la question est de savoir par où on commence ?

Pour développer mon propos, je me suis appuyé sur les trois grandes expériences professionnelles et militantes, différentes et complémentaires que j'ai eu la chance de connaître. Un premier engagement en matière de solidarité internationale comme Président fondateur de Vétérinaires sans Frontières qui m’a conduit à travailler auprès des éleveurs de pays en développement. Dix années d’implication comme dirigeant de Greenpeace en France et à l’international au cours desquelles j'ai pu saisir la nature des rapports de force entre gouvernements, entreprises et société civile. Enfin, une activité de conseil auprès de collectivités, d’entreprises et d’associations pour promouvoir des pratiques plus responsables qui m'apprend beaucoup sur le fonctionnement de ces institutions, les blocages possibles et les opportunités à saisir. S’ajoute à cela le court passage que j'ai pu faire en politique, comme conseiller environnement de la candidate du PS à la Présidentielle de 2007.
Je m’efforce aujourd’hui de faire le lien entre les ambitions et les pratiques, entre l’idéal et le réel, pour animer des processus de transitions, de transformations, de métamorphoses dirait Edgar Morin. Avec mon équipe, j'anime ces transitions multiples et complexes en encourageant les passerelles, les échanges, mais aussi les confrontations car nous sommes persuadés que s’il n’y a pas de problème sans solution, il faut aider les acteurs – quels qu’ils soient – à sortir des postures qu’ils adoptent trop facilement et qui bloquent trop souvent les évolutions possibles.
Pour nous, la transformation écologique et sociale est d’abords une question de méthode.
En cela elle est un vrai sujet politique !

A Relanges j'ai pu présenter notre approche de la transitons en partant de nos expériences, en soulignant les limites de la confrontation et en identifiant quelques pistes pour accélérer les mutations au bénéfice d’un développement plus solidaire, plus responsable et de fait, plus enthousiasmant.
C'est surtout sur la méthode que nous avons échanger en soulignant les ressorts de l'action pour changer :
- de CAP afin de remettre l'économie au service de l'homme,
- de REPERES en s'appuyant sur les travaux de la région Nord Pas de Calais et de l'ARF sur l'identification de 3 indicateurs
synthétiques de développement décrivant de manière bien plus complète l'état de santé d'un territoire,
- d'ECHELLES pour ne pas se contenter du "small is beautiful"...
- de METHODES afin d'outiller les démarches pour en optimiser l'efficacité.

Naturellement, nous avons terminé nos échanges en soulignant la nécessité de promouvoir aussi des changements à apporter dans la façon de faire de la politique : plus d'ancrage au terrain, limitation des mandats dans le temps et interdiction du cumul...
Mais surtout nous avons souligné qu'il était essentiel de changer notre perception du changement pour passer de la dénonciation destructrice, à l'optimisme de la construction partagée.

Bruno REBELLE

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Billets / Tribunes

| Par Bruno REBELLE | Dimanche 15 Avril 2012 à 15:11 | 1 commentaire

Passer d'une société du « tout pétrole » et du « tout nucléaire » à une société de la sobriété et de l'efficacité énergétiques implique une décentralisation partielle de la politique énergétique.

Ce texte a été publiée dans le journal La Tribune le 23 mars 2012.


Transition énergétique : pour une nouvelle donne territoriale
La transition énergétique n'est pas un phénomène à la mode. Elle est l'un des piliers du nécessaire redressement économique, social et environnemental de la France porté par François Hollande. Pour répondre à l'urgence climatique, pour retrouver une prospérité durable, déconnectée des seuls intérêts financiers et de notre dépendance aux énergies fossiles et fissiles, pour promouvoir les énergies renouvelables et réduire les factures des consommateurs, cette transition appelle un cap politique affirmé. Elle nécessite aussi un vrai débat démocratique pour associer pleinement les acteurs à la mutation des usages et comportements qu'elle impose. Enfin, cette transition appelle, pour se concrétiser, une nouvelle donne territoriale.

Jusqu’ici la gestion de l’énergie faisait l’objet d’une très forte centralisation. L'Etat fixait des objectifs de production sans chercher à maîtriser la hausse continue de la demande. Notre pays est, de fait, marqué par de grosses unités de production qui desservent par des « tuyaux » de grande capacité, notamment les lignes à très haute tension, des centres de consommation urbains ou industriels parfois très éloignés des lieux de production. Même si cette organisation garantit la sécurité d'approvisionnement et la péréquation de la puissance, cette centralisation de la politique énergétique est aujourd'hui à repenser : coûteuse pour les consommateurs qui paient les pertes d'énergie dues au transport, elle est de surcroît inadaptée aux fluctuations de la demande, en particulier aux pointes hivernales qui obligent à importer très cher de l'énergie produite chez nos voisins, souvent à un coût environnemental élevé.

Les collectivités locales ont la connaissance du terrain, l'expérience de la culture partenariale. Elles sont à l'origine des trois quarts de l'investissement public national. Au contact de la population et des acteurs qui font vivre nos territoires, elles sont les mieux placées pour impulser, animer et harmoniser la combinaison d’initiatives principalement individuelles de massification du recours aux transports collectifs ou aux véhicules propres, de rénovation des logements, de changements d’appareillages électriques, de modification des habitudes de consommation au quotidien donnant corps à une politique nationale de sobriété et d’efficacité énergétique.
Nos collectivités locales sont déjà à la manœuvre, par les missions qui leur incombent, notamment comme propriétaires des réseaux de distribution, mais aussi pour faire ce que l'Etat n'a pas su ou voulu faire, en particulier sur le bâti résidentiel qui, avec les transports, reste le principal gisement d’économie. Mais ces initiatives ne sont pas suffisamment coordonnées, elles souffrent d’un manque de financement dédié, et surtout d'un grave déficit d'impulsion d'un Etat stratège.

Les Régions, déjà compétentes pour l'aménagement, les transports, le développement économique et la formation professionnelle, sont l’échelon le plus pertinent pour impulser une économie plus sobre en carbone, et animer le pilotage de proximité qu'appelle la transition énergétique. Les banques publiques régionales d'investissement et le Fonds énergies vertes, proposés par François Hollande, constitueront le socle de cette transition, renforçant la structuration de filières locales par un soutien décisif aux PME et entreprises innovantes dans l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables.

L’action des Régions en matière de formation et d’emploi devra aussi être renforcée pour répondre aux besoins générés par le vaste chantier de rénovation thermique des logements programmé.
Les Schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie, issus du Grenelle, doivent devenir de vrais outils de planification régionale prescriptifs, adaptant aux spécificités locales les objectifs nationaux de sobriété, d’efficacité, et de développement des renouvelables. Ainsi, les Régions auraient à charge de coordonner les plans climat énergie territoriaux des collectivités situées dans leur ressort. L’Etat, en complément, devra organiser des moyens nouveaux pour associer les Régions aux économies qu'elles auront suscitées par leurs politiques, par exemple en les intéressant au développement de l'auto-consommation des énergies renouvelables locales.

Il est aussi urgent de clarifier le rôle des différentes collectivités pour optimiser l’offre de transports collectifs. La coordination des transports devrait être améliorée entre les différents échelons territoriaux pour tous les transports interurbains, ferroviaires comme routiers, et pour la mobilité de proximité en agglomération. Cette simplification facilitera l’organisation de services plus adaptés et à terme plus économes. Concomitamment, les compétences et les règles d'urbanisme devront être adaptées afin de placer la sobriété énergétique au cœur des politiques d'aménagement, en particulier en limitant l'étalement urbain.

Cette nouvelle donne territoriale est capitale. L’Etat ne peut pas tout décréter. Promouvoir cette approche territoriale de l’énergie permettra d’entrer de plain-pied dans une logique de changement de modèle aujourd’hui incontournable et que nous n’avons pas encore intégrée psychologiquement. La multiplication des actions concrètes dans les territoires, au plus près du terrain, connectera l’intérêt de tous et de chacun aux enjeux climatiques et énergétiques. C'est aussi cela le sens du grand débat sur la transition énergétique que veut engager François Hollande au lendemain de l'élection présidentielle.

Nous faisons le pari que la reconnaissance des décisions prises localement est la clé de la participation active des acteurs qui, dans les territoires, sauront valoriser tous les gisements d’économie d’énergie et exploiter des ressources aujourd’hui négligées. Enfin et surtout, cette nouvelle gouvernance, responsabilisant en proximité les citoyens, enrichira le débat en invitant chacun à participer aux arbitrages pour définir le meilleur équilibre entre bénéfices et nuisances des différentes options nécessaires pour couvrir nos besoins d’énergie. En plus d’apporter des réponses durables à l’équation énergétique, nous aurons là un bel exercice de démocratie active.

Cette Tribune a été cosignée par François Brottes, député et conseiller énergie de François Hollande. Alain Rousset, député, et Président de la Région Aquitaine, responsable du Pôle entreprises de François Hollande et Bruno Rebelle, expert en développement durable, et conseiller auprès de plusieurs collectivités.

Bruno REBELLE

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Billets / Tribunes

| Par Bruno REBELLE | Dimanche 12 Février 2012 à 22:39 | 0 commentaire

Une des orientations de la coopération entre l’Europe et l’Afrique est destinée à renforcer les dynamiques de développement local pour inciter les candidats à l’émigration à rester au pays. Si l’ambition est louable, la mise en œuvre de certaines de ces initiatives est assez désespérante. La Ferme de Mbilor dans la vallée du fleuve Sénégal est un de ces projets aussi couteux qu’inutiles.


Eléphants blancs, encore et encore !         Chronique Sénégalaise
Tout le monde garde en mémoire les flux de migrants du Sénégal, du Mali et de Mauritanie, tentant d’entrer en Europe par les portes espagnoles des iles Canaries ou de Ceuta. En 2006, l’Espagne prenait des mesures radicales pour fermer ses frontières et renvoyer les candidats à l’exode, la plupart du temps des jeunes en quête d’emploi, vers leurs pays d’origine. Conscients de la nécessité de traiter aussi le problème à la source, la coopération espagnole proposait dans le même temps des projets de développement visant à garder les jeunes au pays.
En février 2012, j’ai eu l’occasion de découvrir un de ces projets « pilotes » conçu pour créer de l’emploi local et fixer les jeunes professionnels au pays. La déconvenue est totale : la ferme de Mbilor est un de ces projets stupides qui viendra rallonger la longue liste des « éléphants blancs » dénoncés depuis des décennies et dont l’Afrique est malheureusement encombrée.

La Ferme de Mbilor, à 8 heures de route de Dakar, occupe 4000 hectares destinés à la culture fourragère intensive irriguée par rampes circulaires automatisées comme on en voit aux Etats Unis. Soulignons que pour implanter ces cultures, il a fallu déplacer les agriculteurs qui vivaient de leurs productions vivrières sur la rive du fleuve. Mbilor c’est aussi une étable, dont la structure et le design feraient rêver bien des producteurs français. Elle est équipée d’une salle de traite de 10 places, dans un pays où l’on trait à la main des zébus qui ne produisent que 2 à 4 litres de lait par jour. L’étable héberge un troupeau de 100 vaches jersiaises de race pure, débarquées du Danemark il y a tout juste un mois. Toute l’installation a bien sur été importée en kit d’Europe… comme le fourrage, arrivant directement d’Espagne, pour nourrir les animaux avant que la production locale ne couvre les besoins. Plus délirant encore, alors que les vaches commencent à mettre bas et entrent en production, personne n’a imaginé comment le lait serait commercialisé… 100 vaches qui produisent 10 à 15 litres par jour ce sont tout de même 1500 litres qu’il faudra conditionner et distribuer dans les 24 heures dans une région où il fait 30 à 40°C et où les réfrigérateurs en état de marche se comptent sur les doigts d’une main. Voilà pour la dimension « économique » !
Eléphants blancs, encore et encore !         Chronique Sénégalaise

Mais, pas de panique, la dimension sociale du projet n’a pas été oubliée. Une centaine de bénéficiaires a été identifiée et organisée en 4 groupements qui se verront confiés l’exploitation de cette ferme ultramoderne, depuis la production du fourrage à la commercialisation du lait. Qu’on se rassure les bénéficiaires recevront une formation de 9 mois… A cette date la « garantie » du concepteur du projet, prendra fin. Et malheureusement, ce n’est pas un gag ! Quand on sait qu’en France on forme les jeunes entrepreneurs agricoles en plusieurs années, on peut raisonnablement douter de l’efficacité d’une formation de neuf mois pour s’approprier de technologies sans commune mesure avec les pratiques locales.

Tout cela à un coût : l’investissement représente 1,2 millions d’Euro en dehors du coût des experts espagnols qui encadrent le projet. Cela représente 12.000 € par « bénéficiaire », c’est à dire 10 ans de rémunération au salaire minimum conventionnel sénégalais pour chacun des bénéficiaires… On se dit qu’il aurait probablement été plus « adapté » de proposer à chacun de ces bénéficiaires un crédit équivalent pour qu’ils développent le projet de son choix. On ne peut aussi s’empêcher de comparer cet investissement avec d’autres options en matière de développement local. Ainsi le forage de Tionokh, à une centaine de kilomètre au Sud de la ferme de Mbilor, n’a coûté que 600.000 €, juste deux fois moins cher. Ici rien d’importé, que des technologies locales et un impact tout différent. 5000 villageois ont maintenant accès à l’eau, tous les jours. Ils se sont organisés pour gérer l’équipement, et faire payer l’eau à son juste prix. L’association des usagers du forage, assure l’entretien de équipements et met de côté chaque mois l’argent qui lui permettra dans 5 ans de remplacer la pompe et le moteur qui seront arrivés à la fin de leur vie. Et comme le plus important dans ce processus est l’organisation des acteurs locaux, les éleveurs se sont organisés, avec l’aide de l’ONG Agronomes et Vétérinaires sans Frontières, en Unité pastorale, pour gérer les pâturages qui entourent les villages, organiser une cohabitation harmonieuse entre agriculteurs et éleveurs et surtout préserver les ressources naturelles fragiles dans cet environnement sahélien. Rien de très spectaculaire, certes, mais une dynamique tellement plus efficace !

Soulignons que dans cette alternative, l’investissement consenti représente 2 mois de salaire par personne impliquée… De quoi faire réfléchir, espérons-le, les décideurs de la coopération espagnole et les responsables sénégalais !

Bruno REBELLE

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