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"Face aux crises, une solution : la conversion écologique et sociale de notre société"

Billets / Tribunes

| Par Bruno Rebelle | Jeudi 9 Septembre 2010 à 22:05 | 0 commentaire

Les Universités d’été des écologistes réunis qui se sont tenues récemment à Nantes marquent un tournant significatif. On y a vue une belle convergence d’enthousiasme pour continuer à pousser l’écologie politique comme élément structurant d’un nouveau projet dont notre société à bout de souffle à urgemment besoin.


Quelques enseignements de Nantes
J’ai eu la charge, et la chance, d’animer le débat fort intéressant traitant de l’alliance à construire pour battre la droite en 2012. Il n’est pas très difficile de faire parler des personnalités aussi diverses que Corinne Lepage de Cap 21, Corinne Morel d’Arleux pour le Front de Gauche, Patrice Bessac pour le PC, Pierre Moscovici du PS et nos amis Dany Cohn Bendit et Cécile Duflot. Il était plus difficile d’imaginer ce qui pourrait sortir de cette rencontre d’acteurs tiraillés entre les enthousiasmes d’une possible victoire de la gauche réunie, les oppositions programmatiques anciennes et quelques crispations actuelles, et pas seulement sémantiques des anticapitalistes notoires opposés aux tenants d’une réforme radicale du libéralisme.

Le débat a bien eu lieu et il a montré deux choses importantes. La première est que lorsque l’on veut vraiment gagner, il est possible de dépasser les apriori et les jugements de principe. Comme l’a souligné Moscovici, reprenant mon propos introductif, aucune force politique en présence ne pourra gagner seule en 2012. Dès lors il faut écouter avec attention les discours des uns et des autres pour mesurer les mutations en cours et identifier les convergences de fonds qui commencent à émerger et qui devraient permettre de construire « l’arc républicain » pour interdire la reconduction du locataire de l’Elysée. Peu importe qu’il y ait encore quelque doute sur l’ampleur de la mutation écologique qu’aurait effectué le PS. Le fait que le texte adopté par la convention sur le nouveau modèle développement marque une rupture. Le principal parti de Gauche reconnaît explicitement que l’écologie ne peut plus être délégué à une formation « périphérique ». Les mots sont peut être encore hésitants mais il est dit clairement que cette préoccupation doit irriguer le projet socialiste pour engager la transition écologique et sociale de la société. Les écologistes doivent tirer deux conclusions de cette évolution – qui n’est pas encore révolution…

D’une part, ils font maintenant jeu égal sur le débat politique au sens où l’écologie politique doit elle même sortir du réduit dans lequel la « délégation thématique » l’avait cantonné. Si le projet de l’écologie prend plus significativement forme depuis les Européennes de 2009, s’il s’est renforcé encore avec les Régionales de 2010, force est de constater qu’il y a encore pas mal de travail à faire pour que le projet d’une nouvelle organisation de la société porté par les Verts et Europe Ecologie réunis gagne en crédibilité, notamment sur les questions économiques ou industrielles et sur les enjeux de sécurité ou de justice sociale. Cette crédibilité passera aussi par une maturité accrue des militants qui doivent élargir progressivement et avec pertinence le champ de leurs préoccupations prioritaires historiquement centrées sur la question environnementale.

D’autre part, puisque le « vert » est entré, non pas dans le fruit mais dans la « rose », il faut s’engouffrer dans la brèche et mettre le Parti socialiste face à ces hésitations et ses contradictions chaque fois que possible. Pas seulement pour gagner sur des combats symboliques comme Notre Dame des Landes mais pour forcer les socialistes à approfondir leur réflexion et mettre en cohérence leurs propositions.

A l’autre bout de l’arc républicain qu’il faudra construire, on a pu constater à Nantes, qu’en dépit des critiques qu’elle avait formulées contre les Verts jugés trop anticapitalistes, Corinne Lepage a été chaudement applaudie, en particulier pour ses propos sur la politique énergétique. Constater que le discours de cette ancienne ministre d’un gouvernement de Droite trouve un écho favorable dans cette assemblée plutôt ancrée à gauche est un bel encouragement à poursuivre le dialogue pour identifier ce qui peut – et doit rapprocher – les écologistes soucieux de promouvoir une véritable transformation écologique et sociale de la société.

Le deuxième enseignement de ce débat est qu’il faut s’engager très rapidement dans une démarche pragmatique pour identifier les points de convergence possible, convergences sur lesquelles il sera possible de construire un accord suffisamment fort. La méthode proposé par Dany Cohn Bendit et qui consisterait à repérer une vingtaine de points sur lesquels nous devront construire ces convergences me semble la bonne. C’est effectivement dans les détails que le diable se cache et il faudra débusquer ces détails qui fâchent et qui si on ne les pointent pas suffisamment tôt conduisent au délitement progressif de l’alliance et génèrent désillusions et frustrations. Et pour que les détails ne nous aveuglent pas il faudra, me semble-t-il savoir prendre de la hauteur. Cela peut paraître contradictoire mais ç ne l’est pas. Par exemple, pour éviter de s’enfermer dans l’opposition historique entre pro et anti nucléaire, parlons de politique énergétique à l’échelle européenne en croisant les enjeux climatiques, les préoccupations légitimes de souveraineté énergétique, les questions incontournables de coût et les conséquences en matière de précarité énergétique, les intérêts d’une diversification et d’une déconcentration de la production en matière de création d’emploi et d’autonomie des territoires. C’est par cette approche que nous ferons aisément, la démonstration que le nucléaire n’a pas sa place dans cette politique et qu’il convient d’en programmer la sortie. Nous pourrions, d’ailleurs reprendre l’argument avancé à Nantes par Corinne Lepage, d’un débat sur l’utilisation responsable de l’investissement public qui en dans la période de contrainte budgétaire que nous traversons devrait finir de convaincre les plus défenseurs les plus zélés de l’atome. Nous pourrions préconiser la même approche pour éviter la confrontation directe sur les OGM et parler de stratégie agricole pour une souveraineté alimentaire élargie au pays du Sud. Nous pourrions parler de réseaux de transports pour éviter d’être coincés dans les logiques « localo-localistes » de tel ou tel tronçon d’autoroute. La démarche est exigeante certes. Elle est complexe, nous n’en doutons pas. Mais la construction d’un accord sur des principes fort et clairement affirmés est probablement à ce prix. C’est aussi dans cet exercice que nous devrons souligner, comme nous y invitait Cécile Duflot dans sa conclusion du débat, les principes réplicains qui nous sont chers et qui sont si brutalement foulés au pied par Sarkozy.

Nous avons encore un peu de temps pour construire cet « accord de principes ». Mettons nous au travail sans tarder !



Quelques enseignements de Nantes

Bruno Rebelle

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