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"Face aux crises, une solution : la conversion écologique et sociale de notre société"

Billets / Tribunes

| Par Bruno Rebelle | Mardi 29 Mars 2011 à 10:12 | 0 commentaire
Fukushima : vous avez dit accident ?
Je ne tiens plus… voilà plusieurs jours que je me retiens de pousser un coup de gueule… Hésitation motivée par l’impression que tout aurait déjà été dit… Mais ce matin encore, 29 mars 2011, la radio égraine une litanie de « nouvelles révélations » sans qu’à aucun moment, aucun journaliste, commentateur, décideur n’accepte de dénommer le drame de Fukushima pour ce qu’il est une CATASTROPHE industrielle du rang des Bhopal, Seveso… et Tchnernobyl.

Il est pourtant frappant de constater que dans les médias étrangers – anglo-saxons notamment – il y a plusieurs jours déjà que ce terme de catastrophe circule. On peut comprendre que l’Etat français, imprégné qu’il est du dogme nucléaro-industriel, ait quelques difficultés à reconnaître l’évidence : au delà d’un certain seuil un accident industriel dans une centrale nucléaire devient incontrôlable… On comprend moins pourquoi et comment les médias français continuent à s’autocensurer en évitant d’employer le mot fatal : catastrophe !

Quelques semaines après le drame japonais provoqué par la conjonction d’un tremblement de terre exceptionnel et d’un tsunami dévastateur, c’est tout l’argumentaire des nucléocrates qui s’effondre. Ceux là même avaient balayé d’un revers de main l’accident de Tchnernobyl, attribuant l’explosion du réacteur n°1 à une erreur humaine. Le lobby de l’atome s’en tirait à bon compte : les ingénieurs français ne pouvaient en aucun cas être comparés aux techniciens irresponsables, apprentis sorciers qui auraient poussé de manière irresponsable les tests de résistance des systèmes de sécurité de leur réacteur… jusqu’à l’emballement incontrôlé et jusqu’au drame dont toute une région paye encore – plus de 20 après - les conséquences. Tchnernobyl ne pouvait donc pas arriver en France !

Au lendemain du Tsunami qui a dévasté la région de Shendaï, les promoteurs du nucléaire franco-français ont sauté sur l’argument géographique : la France avec ces 58 réacteurs est naturellement à l’abri d’une telle conjonction de catastrophes naturelles. Et même si certaines centrales sont installées sur des zones sismiques reconnues elles ne peuvent certainement pas être « en plus » submergées par un tsunami. Dont acte… Mais le « problème » nucléaire n’est pas là. Quelque soit la cause initiale de l’incident nucléaire, ce que nous apprend – une nouvelle fois Fukushima – c’est qu’au delà d’un certain seuil l’emballement d’un réacteur nucléaire est incontrôlable. Il n’est donc pas très utile d’ergoter sur les évènements qui peuvent provoquer cet incident initial, il est surtout urgent d’admettre cette évidence : l’homme ne maîtrise pas la technologie nucléaire !

C’est pour cette raison, et pour bien d’autres qu’il faut au plus vite dessiner une autre politique énergétique qui s’affranchisse du risque nucléaire comme elle devra s’affranchir du risque climatique.

Bruno Rebelle

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Billets / Tribunes

| Par Bruno Rebelle | Mercredi 9 Mars 2011 à 14:45 | 0 commentaire
Gaz de schiste du Québec à la France : deux traitements du sujet
Les gaz des schistes suscitent des débats houleux, aux Etats Unis, en France et au Québec. Le ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec, Pierre Arcand, vient de rendre le rapport du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) sur le développement de l’industrie des gaz de schiste au Québec. Le BAPE est un peu l’équivalent de notre Commission nationale du débat public. Un peu seulement car la CNDP fait bien pâle figure à coté du BAPE. Que ce soit en matière d’indépendance, de densité des études et rapports publiés ou de transparence des concertations, notre système français gagnerait beaucoup à s’inspirer des mécanismes canadiens d’évaluation des risques environnementaux et de conduite des débats publics.

Il n’est dès lors pas surprenant de constater que le Ministre québécois conditionne la poursuite des travaux d’exploration des gisements potentiels de gaz de schistes à la mise en œuvre d’un processus d’évaluation environnementale stratégique, suivant en cela la principale recommandation du rapport du BAPE qui fait 43 constats sur la problématique et n’émet pas moins d’un centaine d’avis pour traiter cet épineux dossier.

Un des principaux constats du rapport du BAPE est de souligner l’état très parcellaire des connaissances autour des gaz et huiles de schiste, des modalités de leur extraction et des impacts environnementaux de cette exploitation. La mise en œuvre d’une évaluation approfondie semble donc l’attitude de précaution la plus responsable. Certains, l’industrie québécoise notamment, voient dans cette investigation supplémentaire un moratoire qui cache mal son nom. D’autres, les écologistes les plus radicaux, interprètent cette décision comme une façon habile pour le gouvernement québécois de gagner du temps au moment où sa côte d’impopularité bat des records. J’y vois pour ma part, une forme de sagesse qui consiste à analyser plus en profondeur les tenants et les aboutissants d’une problématique encore mal connue. J’y vois aussi une façon intelligente de consolider une position consensuelle et de pacifier les débats.

Je suis d’autant plus confiant que l’on parle bien d’une évaluation environnementale stratégique dont l’objet serait au delà de « l’évaluation des impacts et des risques environnementaux et la définition des seuils d’acceptabilité et des méthodes de mitigation appropriée » de cerner « la pertinence socio-économique de l’exploitation » de cette ressource. Tout est là : c’est bien l’interrogation de la pertinence du développement de cette nouvelle technologie. Une pertinence qui, bien évidemment, doit être analysée, au Québec comme en France, en rapport aux enjeux des politiques énergétiques nationales et internationales : sécurité d’approvisionnement, lutte contre le changement climatique, protection de l’environnement local…

Faisons donc le pari qu’après s’être donné 6 mois (de septembre 2010 à février 2011) pour conduire une première série d’audiences, recevoir presque 200 rapports et contributions de toutes origines et produire un rapport déjà très complet recommandant de conduire une évaluation environnementale stratégique, les autorités de la « Belle province » engageront avec le même sérieux un questionnement de qualité sur la pertinence d’exploiter, dans des conditions problématiques, des combustibles fossiles dont le monde, en général, et le Canada, en particulier, devraient apprendre à se passer.

Espérons aussi, que notre ministre française de l’écologie ait la sagesse d’engager une telle évaluation stratégique avant que les citoyens, les associations et les territoires concernés ne l’imposent. Le débat y gagnerait en qualité et en perspective.

Bruno Rebelle

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Revue de presse

| Par Bruno REBELLE | Mardi 8 Mars 2011 à 11:07 | 0 commentaire

ITV donnée à la lettre du cadre


Bruno Rebelle, ancien directeur de Greenpeace est aujourd'hui consultant en développement durable. Conseillant beaucoup de collectivités, il nous livre son regard sur la manière dont les collectivités prennent la mesure de l'enjeu environnemental.

Pour écouter l'intégralité de l'interview en podcast

« Les collectivités sont au coeur du développement durable »
Un « livre blanc » de l'action des régions de France en matière de développement durable a été réalisé en 2007. Où en est-on aujourd'hui ?

Au début du Grenelle de l'environnement, l'idée était de produire ce premier bilan pour le congrès des régions de France, fin 2007. On a pu voir que du fait même de leurs compétences, les régions sont naturellement impliquées sur les enjeux de développement durable, quand elles travaillent sur la formation permanente, la cohésion sociale, l'aménagement du territoire, la préservation des ressources naturelles, la valorisation du patrimoine naturel.

Nous avons aussi pu constater qu'il y avait des gestions des enjeux de développement durable différenciés d'une région à l'autre, des niveaux de compréhension différents, avec plus ou moins de prise en compte des trois dimensions du développement durable et une plus ou moins bonne articulation des enjeux de gouvernance. Les régions se sont beaucoup impliquées dans les logiques de négociations au niveau local, puisqu'un des bénéfices du Grenelle de l'environnement a été d'impulser des logiques de concertation, y compris au niveau régional. On fait aujourd'hui une nouvelle version du livre blanc de l'engagement régional pour pouvoir en mesurer l'évolution.

Les collectivités, ont-elles pris la mesure des enjeux et des choses à entreprendre ?


C'est évident. À la fois parce qu'elles font se croiser dans leur gestion des questions économiques, sociales et de préservation de l'environnement, et parce qu'elles sont en interaction permanente avec les acteurs, les citoyens et les autres niveaux d'autorité, nationales ou européennes, les collectivités sont au cœur des enjeux.
C'est au niveau des collectivités locales qu'on va pouvoir agir de la manière la plus significative sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La question n'est donc pas tant celle de leur volonté, que celle des outils mis à leur disposition pour vraiment à bras-le-corps les enjeux.
L'une des difficultés auxquelles elles sont confrontées est de rentrer dans une logique d'amélioration continue, qui est un des moteurs du développement durable. Pour cela, il faut pouvoir se donner des objectifs chiffrés, les mesurer, évaluer l'impact des politiques publiques... Mais ces logiques ne sont pas encore complètement intégrées par les collectivités. Travailler sur ces sujets permet, petit à petit, de faire progresser les ambitions du développement durable dans les collectivités.

Quelle est l'échelle territoriale pertinente pour les plans climat territoriaux et les politiques énergétiques décentralisées ?

Si l'on veut décliner sur les territoires les ambitions internationales, européennes et nationales en matière de réduction des émissions à effet de serre, c'est plutôt à l'échelle régionale et des agglomérations qu'on va pouvoir agir, au niveau d'un bassin d'activité ou d'un bassin de vie.
Rappelons qu'en France, nous avons l'objectif du facteur 4, c'est-à-dire de diviser par 4 nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, ou la balise temporelle plus proche, en 2020, avec la déclinaison des objectifs européens du 3 fois 20, c'est-à-dire 20 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre, 20 % d'optimisation de l'étiquette énergétique, et une part de 20 % - et même de 23 % pour la France - d'énergies renouvelables dans le mix énergétique.
L'échelon régional me semble le bon territoire de coordination parce qu'on est sur un territoire suffisamment grand et qui correspond à un ensemble éco-systémique cohérent.

Ensuite, les plus gros leviers sont dans les grandes agglomérations, parce que les émissions d'un territoire sont en grande partie liées aux déplacements, urbains et périurbains, aux logiques d'habitat et de densité tertiaire et à la consommation de biens et de services des ménages. Ces trois secteurs représentent 75 % des émissions. 80 % de la population d'un pays comme la France est ou va être en zone urbaine : c'est sur ces espaces urbains qu'il faut travailler.

En dehors des grandes villes, l'échelle des intercommunalités, des pays est pertinente. Ça n'exonère pas de travailler avec l'échelon départemental, par exemple sur les articulations des objectifs de transport. La région gérant les transports ferroviaires, le département les transports routiers inter-urbains et les agglomérations les transports sur leur propre territoire. Si on n'articule pas clairement ces différents enjeux, on aura du mal à réduire la part du véhicule particulier dans les déplacements de personnes.

Quelle est aujourd'hui la demande la plus pressante des collectivités ?

Le premier c'est la formulation de règles de conditionnalité des aides qu'elles vont attribuer, de façon à s'assurer que les crédits qu'elles mettent à la disposition des acteurs servent le mieux possible leurs ambitions de développement durable. Le terme de conditionnalité des aides fait parfois peur. Il faut plutôt le prendre dans un sens positif, c'est-à-dire donner du sens, donner de la cohérence à la politique publique sur le territoire.

Deuxième sujet : le lien entre les politiques publiques et la prise en compte par les acteurs du territoire, citoyens et acteurs économiques, des options qui sont permises par ces politiques. Si une collectivité met en place un plan climat et propose des options qui permettront aux citoyens de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, encore faut-il que ces citoyens saisissent ces opportunités. Dans cette articulation entre « je vous donne la possibilité de faire ça » et « je vous encourage à le faire », il y a encore du travail à faire sur la mobilisation citoyenne. Ce sont des logiques d'implication, de mobilisation, de communication... qui permettent à une collectivité d'avoir l'ensemble de ses administrés avec elle.

Que pensez-vous de la candidature d'Annecy pour les JO ?

J'aime beaucoup ma ville natale. Les Jeux olympiques peuvent être un événement extrêmement enthousiasmant de rassemblement international. Mais, très sincèrement, je pense aussi qu'il faut aborder ces projets avec beaucoup de mesure et notamment rechercher les sites vraiment optimums, en particulier en valorisant les installations existantes et évitant de refaire des infrastructures qui mitent le paysage.

Et dans ces conditions-là, je ne suis pas certain que la candidature d'Annecy soit la meilleure option pour offrir des Jeux olympiques les moins impactants. Mais je dis bien qu'il faut reconnaître aussi la valeur de cet événement comme celui-là en termes de cohésion collective, d'enthousiasme, de partage d'un événement majeur... Ça n'est pas du tout une opposition fondamentale aux jeux olympiques, c'est bien un questionnement sur la pertinence de l'option Annecy par rapport à certaines contraintes.

Lalettreducadre.fr - 01/03/11

Bruno REBELLE

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